De quoi dépend l'architecture ? Des gens, de l'époque, de la politique, de l'économie, de l'éthique, du désordre... Bref, du réel dans son imprévisible complexité et son irréductible incertitude. Jeremy Till invite les architectes à prendre davantage en considération ces contingences, qui excèdent leur sphère de contrôle mais finissent toujours par s'imposer leurs oeuvres. Avec rigueur et ironie, l'auteur déconstruit pas pas l'autonomie que les architectes confèrent leur discipline et qui les maintient dans une vision pure et idéale des objets qu'ils conçoivent. I.es circonstances contrarient pourtant les plans les mieux tracés, à tout moment du processus, de la conception jusqu'à la construction et à l'utilisation d'un bâtiment. Le "Less is more " de Mies fait invariablement place au Mess is de '1h11. Et si cette menace de déstabilisation s'avérait être une formidable opportunité ? Les architectes n'ont-ils pas tout gagner descendre de leur tour d'ivoire, et les "starchitectes" de leur piédestal, pour engager un dialogue ouvert et constructif avec leurs multiples interlocuteurs - experts, décideurs, artisans, usagers, habitants - mais aussi avec les choses qui les entourent - matériaux, règlements, déchets, phénomènes climatiques ? La clé pour produire une architecture plus utile et plus humaine, mais surtout pour espérer transformer le monde.
Jeremy Till est architecte, chercheur et enseignant. Professeur d'architecture au Central Saint Martins College of Art and Design, University of the Arts à Londres, il dirigea cette école entre 2012 et 2022. En tant qu'architecte, il est l'auteur avec Sarah Wigglesworth d'une maison remarquée à Londres. En 2006, il fut le commissaire du Pavillon britannique à la Biennale de Venise. Il a notamment publié : Flexible Housing (2007) avec Tatjana Schneider et Spatial Agency. Other Ways of Doing Architecture (2011), avec Tatjana Schneider et Nishat Awan.