Gog - Tapa blanda

Dans le rayon rééditions , où l'on peut découvrir des trésors oubliés, ne loupez pas avant son inévitable épuisement (le tirage est de 600 exemplaires et la pile fond...) cette résurrection du plus provocateur des livres du plus provocateur des auteurs italiens du XXème siècle. Dans Gog, Giovanni Papini met en scène un milliardaire décidé à dilapider son capital avec grandeur, prêt à toutes les expériences qui le tireraient de l'ennui qui guette ceux qui ont tout. En courts chapitres insolents, il fait défiler tout ce que la planète compte de charlatans, de philosophes, d hurluberlus, de génies ou d'escrocs, accourus dans l'espoir du lucre. Féroce, d une actualité qui nous fait oublier que le livre date de 1930, Gog a le charme de ces livres qui en veulent à notre intelligence et se plaisent à la défier. N allez pas le manquer : imaginez qu'on ne le réédite pas avant cinquante ans ! --Un été, des livres , catalogue de la librairie Mollat

Un Florentin au purgatoire Giovanni Papini - Cet esprit encyclopédique, pieux et vénéneux à la fois, et qu'admirait Borges, est à redécouvrir. L'italien Giovanni Papini (1881-1956), maître absolu du grand écart littéraire, aurait dû figurer en bonne place dans l'Anthologie de l'humour noir de Breton. Il y aurait retrouvé sans déplaisir Poe et Baudelaire, qui avaient fait ses délices au cours de son enfance florentine, mais également le doyen Swift dont les sarcasmes apocalyptiques durent flatter sa fibre créatrice. Mais c'est en encyclopédiste que se rêve d'abord l'adolescent pressé d'avoir tout lu et tout synthétisé. Bibliothécaire, puis instituteur, il crée d'innombrables revues avant de publier, à vingt-cinq ans, son autobiographie, Un homme fini, où s'épanouit son désir d'un grand soir esthétique. Papini accueille bientôt avec bonheur le manifeste futuriste de Marinetti et collabore à la revue phare du mouvement, Lacerba. Mais sa nature contrariée le pousse rapidement à la dissidence et, en 1920, s'étant converti au catholicisme, dans un élan proche de celui du paradoxal Chesterton, il publie une Histoire du Christ dont le succès est immédiat. Dix ans plus tard, Papini tombe dans les bras de Mussolini, ce qui lui vaut dès l'après-guerre d'amorcer une descente aux enfers opportunément sanctionnée par l'écriture d'une vie du Diable qui le fait excommunier. Il mourra aveugle à l'âge de soixante-quinze ans. La fiction de Papini, souvent proche de celle du très curieux Baron Corvo qui entretenait comme lui une relation perverse avec le catholicisme romain, n'aura sans doute pas eu la postérité qu'elle mérite. --Le Figaro, 07 juin 2007

GOG est le défilé des artistes, des inventeurs et des ingénieurs les plus originaux de leur temps, qu un milliardaire excentrique et cosmopolite fou "collectionne" pour tromper son ennui. La "musique du silence", la "sculpture invisible", la "chirurgie morale", la vente aux enchères de la république, une collection de coeurs d'animaux vivants. Tout, dans cette civilisation régie par le nombre et par le progrès, finissant par se vendre, cet homme qui peut tout acheter se meurt d'ennui et d'horreur. Amateur de contre-pieds, de paradoxes, de simulacres, Papini délivre, avec humour et exagération, une vision du monde dénuée de tout romantisme, mais ponctuée de quelques éclairs oniriques que n'auraient pas reniés Borges ou Chesterton.